Au cours des périodes de restrictions sanitaires que nous avons connues lors de la crise du Covid-19, la vente de produits biologiques a fortement augmenté !
Faire ses courses était devenue l’une des seules sorties hors de chez soi autorisée, et les consommateurs se sont tournés vers des produits plus naturels, dans une volonté de se rapprocher de la Nature et de renouer avec les produits, et les producteurs, de leur région.
Les ventes de produits alimentaires Bio, qui augmentaient constamment depuis 2007, ont alors connu leur premier déclin en 2021, juste après les divers confinements… Beaucoup d’inquiétudes sont alors nées de cette baisse, alors que la vie “normale” revenait tout doucement…
Était-ce le début de la fin pour le secteur, ou une simple baisse de régime ? Provient-elle d’un désintérêt du consommateur, ou de conditions extérieures au secteur ?
Le Bio : pesticides, écologie, label… Késako ?
L’agriculture biologique, une pratique respectueuse de notre santé et de la planète
Avant de s’attaquer à l’état du marché, et aux raisons de son déclin, faisons le point sur ce qu’est le Bio.
Selon le Ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire,”l’agriculture biologique (AB) est un système global de production agricole qui allie les meilleures pratiques environnementales, le respect de la biodiversité, la préservation des ressources naturelles et l’application de normes élevées en matière de bien-être animal”.
En résumé, l’agriculture biologique se veut être un modèle de production et de transformation respectueux de l’environnement et du bien-être animal. Cela se traduit par des pratiques environnementales optimales pour préserver la biodiversité, définies et encadrées par un cahier des charges : limitation et interdiction de l’utilisation de pesticides (et tout autre intrant), exclusion des OGM et des produits chimiques de synthèse…
Des organismes certificateurs, agréés par l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) et accrédités par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC), s’assurent du bon respect de ce cahier des charges.
Plusieurs logos permettent de reconnaître les produits et d’identifier les produits issus de l’agriculture biologique :
- l’eurofeuille certifie que tous les produits respectent le cahier des charges européen du mode de production biologique,
- la marque AB certifie que le produit que vous achetez contient au moins 95% de produits issus de l’agriculture biologique. Ces produits respectent le cahier des charges français de l’agriculture Bio.
Cette réglementation, imposée par le label, précise les méthodes de production, d’élevage, de préparation, de distribution et d’importation. Elle mentionne également, les listes de produits et auxiliaires utilisables en bio ainsi que les principes de contrôle, de certification, de sanction et d’étiquetage…
LE Bio… ou LA Bio ?
Le covid… euh non LA covid n’est pas le seul mot pour lequel on ne sait plus de quel déterminant utiliser. On a tendance à toujours utiliser “le” pour qualifier le Bio. Pourtant, dire “la Bio” est tout aussi français, et fait souvent plus sens avec la signification que l’on souhaite donner au mot “Bio”.
LE Bio renvoie principalement à l’industrie de l’agriculture du Bio, ce qui englobe le mode de production et le marché du Bio : LE Bio Industriel. Il correspond au cahier des charges dont nous avons parlé ci-dessus. Cependant, les législations concernant le cahier des charges du Bio ne sont pas les mêmes suivant les pays, ce qui peut mener à des déconvenues si des contrôles plus poussés n’ont pas lieu. Par exemple, un produit importé peut être considéré comme Bio, dans son pays d’origine, mais avoir été cultivé avec des pesticides interdits par le cahier des charges Bio français…
LA Bio correspond elle à la “philosophie Bio”, c’est un véritable engagement et une vraie façon de voir les choses : LA Bio paysanne, locale transparente et équitable… Elle prône davantage un modèle de consommation durable, éthique et respectueux de l’environnement et des animaux. Nous parlons de produits Bio, mais également locaux, de saison, avec une faible empreinte carbone, ou du moins, la plus faible possible. L’engagement s’étend au-delà du simple label, c’est un réel mode de vie !
À Trattino, nous avons le goût de LA Bio, c’est notre philosophie et une de nos principales valeurs fondatrices ! Chaque jour, c’est ce vers quoi nous tendons à travers nos plats et boissons. Nous avons la volonté de rémunérer au plus juste nos collaborateurs et de travailler avec des matières premières issues d’un mode de production durable et respectueux de l’Homme et de la Nature, tout simplement !
Un marché en crise, qui peine à se relever
Plus besoin de se demander quel déterminant utiliser si la Bio est amenée à disparaître… mais nous n’en sommes pas encore là !
N’empêche que, si aucune mesure n’est prise, le nombre de fermes dédiées à l’agriculture biologique risque de fortement diminuer, au profit de fermes plus conventionnelles.
L’inflation, la bête noire de la Bio
Que vous ayez pris l’habitude de consommer des produits Bio, locaux et équitables ou conventionnels, un constat récent place tous les produits alimentaires dans le même panier : l’augmentation des prix.
L’inflation, qui s’est accélérée fin 2021, a grandement impacté les prix de l’alimentation. En moyenne, les pâtes, par exemple, coûtaient 20% plus cher en octobre 2022, comparativement à octobre 2021.
Les produits Bio, d’ordinaire plus chers que les produits issus d’une agriculture “conventionnelle”, ne sont que très peu compatibles avec une situation inflationniste. Les consommateurs, dont le pouvoir d’achat diminue, revoient leurs attentes à la baisse, ce qui place le secteur de la Bio dans une situation délicate.
Plutôt que d’avoir comme préoccupation principale, la qualité de ce qui se trouve dans son assiette, tout un chacun va faire attention à ce qu’il restera dans son porte monnaie après avoir fait ses courses.
En France en 2022, 17% de la population n’a pas consommé de Bio au cours de l’année, deux fois plus qu’en 2021.
L’augmentation des coûts de la Bio ne s’explique pas seulement par la hausse des coûts des matières premières. L’inflation se reflète aussi dans les coûts de transports et d’énergie. Les producteurs se retrouvent obligés d’augmenter leurs prix, pas pour grossir leur marge, mais pour absorber l’envolée des coûts liés à leurs activités.
Prenons l’exemple de l’élevage. Les coûts de l’alimentation des animaux de ferme connaissent une croissance alarmante. 80% des charges liées à l’élevage porcin étant dû à l’alimentation, il est logique et dans l’ordre des choses de voir le prix de la viande de porc augmenter.
De nombreuses fermes bio, spécialisées dans l’élevage porcin, risquent de retourner vers d’autres méthodes de production pour assurer leur pérennité. Oui, il est frustrant de voir le prix de son jambon augmenter de 30%, mais ne vaut-il pas mieux diminuer sa consommation de viande, en conséquence, pour une plus juste rémunération des producteurs ?
Des consommateurs noyés sous les labels…
L’inflation n’est pas l’unique raison de la décroissance du marché. La concurrence avec d’autres labels et produits locaux, prônant également des qualités originellement affiliées au Bio, diminue l’attrait pour la vraie Bio.
Prenons le plus connu, le label HEV (Haute Valeur Environnementale), qui est établi sur les performances environnementales des exploitations. Ce label regroupe quatres thématiques : la préservation de la biodiversité, la stratégie phytosanitaire, la gestion de la fertilisation et de l’irrigation.Il est basé sur un quota de points, l’agriculteur peut donc faire ce qu’il veut du moment qu’il en obtient 40. Par exemple, le label HVE n’interdit pas l’utilisation de pesticides et d’intrants chimiques, contrairement au Bio qui est beaucoup plus stricte.
Il est possible d’obtenir le label HVE en plantant des haies et en utilisant certaines méthodes d’irrigation, puis d’asperger ses fruits et légumes de pesticides sans se soucier de leur impact sur la biodiversité locale.
Ce barème indicatif est intéressant, mais sème le trouble dans l’esprit du consommateur, tant sa signification semble être similaire à celle du label Bio. En comparaison à la Bio, il a multiplié par 30 le nombre d’exploitations certifiées, ce qui peut encourager les agriculteurs à se diriger vers ce label plutôt que le label Bio par facilité.
Les producteurs Bio affirment que ce label entretiendrait la confusion autour des signes de qualité, surtout vis-à-vis du label Bio. Pour info, “En janvier dernier, la Fédération des agriculteurs biologiques a déposé un recours en justice contre le label « HVE », pour tromperie au consommateur.” (source francetvinfo).
Il existe d’autres labels “concurrents” très évocateurs : zéro résidus de pesticides, ou vergers éco-responsables… Cette multitude de nouveaux labels “écologiques” entraînent une mauvaise compréhension par le consommateur, souvent mal renseigné.
Environ 1 Français sur 2 dit ne pas avoir assez d’informations sur ce que le label Bio apporte et garantit réellement. Seulement 37% des consommateurs estiment avoir assez d’informations, d’après le baromètre de perception et de consommation des produits biologiques par les Français, réalisé par l’Agence BIO.
… et des agriculteurs en difficultés
Pour toutes les raisons évoquées précédemment, les agriculteurs et producteurs de matières premières et produits biologiques sont en difficulté.
Les méthodes de production induites par la Bio, et la multitude de pratiques incluses dans les cahiers des charges français et européen, permettent de nombreuses externalités positives. En plus de développer la biodiversité locale, l’agriculture biologique la protège !
D’ailleurs, l’absence d’externalités négatives sur l’environnement et la santé humaine constitue une réussite en soi.
Aujourd’hui, nous savons que l’agriculture Bio permet de stocker le carbone dans les sols, de contribuer à la conservation de certains écosystèmes, et de diminuer la vulnérabilité aux aléas naturels (incendies, inondations…).
Différents dispositifs sont nécessaires pour se protéger des pesticides de l’agriculture conventionnelle utilisés par les producteurs voisins, ou pour que la terre et l’eau ne soient pas pollués. C’est à la charge des agriculteurs Bio de mettre en place les différents moyens qui seront nécessaires pour atteindre ces objectifs, comme de grandes haies pour bloquer les pesticides avoisinant.
La difficulté que représente le respect de la totalité des cahiers des charges, notamment la mise en place de ces dispositifs, constitue un frein dans le développement de nouvelles exploitations Bio. Le risque est de voir plus de fermes qui se détournent du Bio que de fermes qui s’y convertissent.
Mais tout n’est pas fini ! Même si nous observons un détournement du Bio ces 2 dernières années, les consommateurs restent convaincus du bienfait de cette agriculture vertueuse.
“82% des Français pensent que l’agriculture biologique contribue à préserver l’environnement, la qualité des sols et les ressources en eau.” (source e-marketing)
Il est important de soutenir ce mode de production, et peut être que la solution n’est pas d’acheter des produits les moins chers possible, mais d’adapter notre consommation au contexte économique actuel, dans une dynamique de préservation et de durabilité.
Quelles mesures mises en place pour sauver la Bio ?
La Bio n’est pas perdue, loin de là. Un petit coup de pouce, en revanche, ne serait pas de refus ! De nouvelles aides et enveloppes ont été débloquées pour faire face à la “crise” actuelle, alors quelles sont-elles ?
Les aides et mesures annoncées
Pour faire face à l’inflation, cause principale de la chute des ventes de produits biologiques, des moyens financiers ont été attribués à l’Agence BIO.
Ces fonds devraient permettre le suivi d’études qui aura pour objectif de comprendre plus précisément la crise, notamment les motifs liés à la diminution de la demande.
Le gouvernement compte également financer, à hauteur de 750.000€, une campagne de communication sur la Bio.
Fonds Avenir Bio dispose d’une certaine somme d’argent chaque année, d’ordinaire 8 millions d’euros, pour permettre de financer des investissements. Ils s’inscrivent dans une démarche de filière pour le développement de l’offre de produits Bio.
Fonds Avenir Bio va faire évoluer ses critères pour financer plus de projets qui ont pour but de structurer et développer des débouchés pour la filière Bio. 5 millions d’euros supplémentaires vont leur être alloués en 2023 !
Afin de répondre aux objectifs d’intégration de 20% de produits Bio et de 50% de produits plus qualitatif et durable dans la restauration collective, les travaux autour de la mise en oeuvre des lois climat et résilience (issue des travaux de la Convention citoyenne pour le climat) et Egalim (loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable) continuent !
Enfin, la nouvelle politique agricole commune (PAC) 2023 – 2027 devrait mettre à disposition 340 millions d’euros par an pour soutenir les agriculteurs dans une optique de conversion en Bio. Un nouveau programme sera construit sur le long terme, Ambition Bio, pour atteindre l’objectif de 18% de production de surface agricole biologique d’ici 2027. Aujourd’hui, près de 59.000 exploitations bio sont présentes sur le territoire, ce qui représente environ 13,41% des exploitations agricoles françaises.
Manque d'objectivité ou abandon délibéré ?
Malheureusement ces mesures ne font pas l’unanimité.
Le monde de la Bio sait bien que les moyens financiers prennent du temps à se mettre en place, et ne répondent pas aux besoins urgents des agriculteurs. D’autres sources de revenus, comme “l’aide au maintien”, leur ont été enlevées.
Les engagements du ministère de l’agriculture sont ambitieux, mais ne sont que rarement atteints. Par exemple, seulement 2% des 9 milliards d’euros de la PAC sont reversés au agriculteurs Bio. Pourtant ils représentent 10% des producteurs français. Les 20% de produits Bio en restauration collective sont loin d’être atteints, et ne seraient qu’à 6% actuellement.
Ce ne sont pas les produits Bio qui coûtent chers à produire, mais tout ce que nécessite la mise en place de ce mode de production écologique et durable. Ce n’est pas avec la somme dérisoire de 166 euros, que l’état a alloué par ferme, que les agriculteurs vont surmonter cette crise.
“Les études démontrent un intérêt considérable de l’agriculture biologique pour les écosystèmes, pour le climat, pour la santé des consommateurs et des agriculteurs.[…] Elle doit être soutenue financièrement via un plan d’urgence. Si rien n’est fait, des paysans Bio, faute de débouchés, vont renoncer. Certains sont d’ores et déjà obligés de vendre leur production bio dans le réseau traditionnel et au prix du conventionnel ! Ce recul serait une véritable catastrophe pour nos territoires, nos écosystèmes et notre avenir.” (source agir pour l’environnement : https://www.agirpourlenvironnement.org/campagne/la-bio-en-danger/).
Beaucoup de pétitions apparaissent pour soutenir les agriculteurs Bio, pour défendre ce mode de production durable au détriment d’autres qui le sont moins. Certaines dénoncent le label HVE, qui n’est pas du tout au niveau du label Bio et utilise encore bien trop de pesticides. Tous ces modes de production “chimiques” ne favorisent pas une diversité du vivant dans nos paysages. Beaucoup d’acteurs tirent la sonnette d’alarme pour que le gouvernement leur vienne en aide, mais ne semblent pas être entendus pour le moment.
“Terrible mépris du gouvernement qui refuse une aide conjoncturelle aux 58.000 fermes Bio. Mépris tellement complet que le ministre a refusé de visiter les stands de la filière au salon de l’agriculture. Alors que nous vivons la 6ème extinction de masse, le gouvernement profite de la crise pour nous mettre la tête sous l’eau et liquider la filière Bio au profit du pseudo-label HVE. Et pourtant nous avons la possibilité de mettre fin à ce mépris gouvernemental, grâce aux 3.000 magasins Bio et alternatifs et grâce aux 10 millions de Français qui choisissent la Bio chaque mois !” Voici un cri d’alerte de l’épicerie bio Chez Gaëlle, qui en cache tant d’autres…
Les impacts de la crise sur Trattino
Cette augmentation du coût des matières premières Bio a inévitablement impacté Trattino, et nous sommes contraints d’ajuster légèrement nos tarifs pour assurer une bonne rémunération de toute la chaîne de production et notre pérennité.
Les valeurs de Trattino sont tournées vers LA bio, mais pas seulement ! Nous avons fait le choix de nous approvisionner chez des fournisseurs et agriculteurs qui respectent la planète, et travaillent de manière éthique. Nous le savons, manger des pesticides coûte bien moins cher, mais à la fin, l’addition pour notre santé et pour la planète est bien plus salée.
À Trattino, 100% des produits sont certifiés Bio (sauf les produits sauvages comme le poisson et la truffe, non éligibles au label Bio). Et, comme tout le monde, nous sommes frappés de plein fouet par cette inflation. Nous souhaitons cependant rester justes dans les prix que nous appliquons, malgré la hausse des coûts, pour rester accessible au plus grand nombre. Cette inflation ne doit pas empêcher les consommateurs de consommer plus sainement et durablement.
À cause de l’inflation, nous assistons à la fermeture de certains magasins ou épiceries Bio et au déclassement de nos produits en conventionnel.
Mais il n’y pas que le coût des matières premières alimentaires qui grimpe en flèche. Le coût du transport et de l’énergie a considérablement augmenté, et se fait ressentir par tous les acteurs de notre chaîne d’approvisionnement, jusqu’à nous ! Suite à l’augmentation du prix de l’énergie, les frais liés à tous nos appareils électroniques sont décuplés (chambre froide, chauffage, lave vaisselle, lave linge, éclairage, …). Les transporteurs ajoutent des frais de transport pour compenser le prix de l’essence, ce qui nous impacte également.
C’est pourquoi certains prix de notre carte ont pris quelques centimes ou euros. Ce n’est pas pour augmenter nos marges, mais pour compenser nos frais, et continuer à rémunérer équitablement tous nos partenaires et salariés. C’est grâce à tous ces acteurs qu’il est possible de continuer à vous régaler de nos plats gourmands, sains, faits maison… et surtout BIO !
Il y a 5 ans, nous étions persuadés de prendre la bonne direction. Aujourd’hui, nous en sommes convaincus ! Vous pouvez nous faire confiance, on a le goût de ne rien lâcher !

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